4. Mélanges et séparation : un pont entre les technologies et sciences de la nature

Le circuit anthropique de l’eau douce ayant été vu avec les élèves, des termes comme « station de captage », « station d’épuration » et « château d’eau » leur sont maintenant connus ; il serait bon de se pencher concrètement sur les processus à l’œuvre dans ces bâtiments.

Cette étape de la séquence va donc être davantage portée sur les technologies, par exemple ici une démarche de traitement des eaux usés par la séparation des constituants.

Plus largement, les opérations de mélanges et séparation des constituants sont cœur de nombreux aspects de la vie des humains. La mayonnaise est un exemple bien connu d’émulsion de l’huile et du vinaigre grâce à l’ajout du jaune d’œuf. La vaisselle est aussi une émulsion d’eau et des graisses de nos repas. Les exemples sont très nombreux et celui des eaux usées est assez simple à explorer.

Le saviez-vous ?
Les eaux usées ne peuvent être rejeté dans la nature en l’état. Elles sont bien trop nocives pour les espèces qui peuplent l’environnement naturel. Ces eaux vont donc faire l’objet de divers traitements avec entre autres des techniques de séparation visant à retirer une partie des constituants. Ces constituants sont récupérés afin de rejeter une eau plus saine.

Les technologies qui sont à l’œuvre et les concepts scientifiques liés sont nombreux et parfois complexes mais certaines sont tout à fait accessibles en classes de primaire : miscibilité, dissolution, mélange homogène/hétérogène, masse volumique, soluté, solvant, etc. Plus largement, c’est la démarche de recherche qui peut être intéressante à mettre à l’œuvre ici.

Lignes directrices de la séquence

Les élèves sont mis en réflexion à partir de la situation de mélange de plusieurs constituants dans un même bocal, imitation de ce que peuvent contenir les eaux usées.

À ce stade, le défi pour eux ne sera pas d’opérer la séparation sur cet ensemble (qui reste intéressant à montrer) mais plutôt sur des combinaisons de deux constituants :

  • Huile et eau colorée
  • Eau colorée et grenadine
  • Eau colorée et sel
  • Sable et eau colorée
  • Glycérine et huile

Pour cette situation, le magazine n°1 de Sciences en Cadence envisage également la lecture de l’album « Ah ! Les bonnes soupes » (Boujon, 1999 – Ed. L’école des loisirs).

Outre le défi de séparation (qui mobilise des techniques et des ustensiles), c’est surtout la construction d’explications qui sera recherchée :

  • Pourquoi certains se dissolvent dans l’eau (mélange homogène) et d’autres non (mélange hétérogène) ?
  • Et dans ce dernier cas, pourquoi (par exemple) l’huile se place au-dessus de l’eau ?
  • Est-ce que l’ordre de remplissage du pot a une importance ? Quel protocole imaginer pour vérifier si l’ordre de remplissage a une importance ?

Il sera alors important que les élèves couchent par écrit leur protocole et ne se contentent pas d’explication orales forcément brèves. Cette étape est importante pour le travail des hypothèses, l’anticipation des résultats et le développement d’une démarche scientifique en général. Le passage par l’écrit leur permettra alors de pleinement réfléchir au protocole, du début à la fin : l’hypothèse mise à l’épreuve, la matériel nécessaire, les étapes de l’expérience, avant d’effectivement la réaliser et pouvoir coucher à nouveau par écrit le résultat de l’expérience / la conclusion.

Par exemple, si l’ordre de remplissage a une importance pour comprendre pourquoi l’huile est au-dessus de l’eau, alors voici ce que ça pourrait donner en termes de protocole.

Le protocole proposé ici vise des niveaux, avant P3 et. Des niveaux supérieurs peuvent permettre de passer à l’écrit.

D’autres peuvent expliquer ce constat en évoquant la « légèreté » de l’huile : le concept de masse volumique peut alors être construit en classe en comparant précisément un volume donné d’huile et le même volume d’eau (ex : 1L), chaque volume placé d’un côté d’une balance à plateau (balance Roberval).

Des modèles modernes et peu couteux existent, ils peuvent être directement utilisés en classe par les élèves.

Un autre défi pour installer le concept de masse volumique serait de pouvoir superposer quatre liquides : huile, eau, grenadine et glycérine. L’ordre là a alors toute son importance – une occasion de plus de travailler avec la notion de miscibilité qui ici intervient à nouveau.

La séquence étant centrée sur la gestion de l’eau, l’on privilégiera le travail sur un mélange de liquides. Cependant, l’ajout au sein de celui-ci de constituants solides, par exemple un gravillon, peut permettre d’étendre la gamme d’ustensiles à utiliser et des techniques de séparation

D’autres questions pourraient encore venir et nécessiter des investigations : pourquoi l’huile ne se colore pas comme l’eau ? Certaines investigations pourraient permettre d’envisager une variété de techniques et l’usage d’autres ustensiles :

  • La décantation de l’eau et de l’huile permettant d’obtenir un mélange hétérogène, les deux liquides n’étant pas miscibles.
  • La filtration (plusieurs sont possibles, du simple tamis au filtre à café)
  • L’évaporation, dans le cas du mélange eau-sel (mélange homogène, le sel est miscible dans l’eau) : soit grâce à une flamme, par exemple en tenant une cuillère d’une eau saturée en sel au-dessus d’une bougie, environ 2 minutes ; soit en plaçant le récipient plusieurs jours au-dessus d’un radiateur.
    • Attention que la cuillère est très chaude, la manipulation doit être réalisée par l’enseignant avec toutes les précautions nécessaires.
    • Nous l’évoquerons ci-après, il y a des extensions possibles vers le dessalement de l’eau ou bien pour aborder le travail autour des marais salants

Plus concrètement, quelques fiches « Mélanges et démélanges – fiches d’expériences » permettent d’envisager d’autres possibles, d’avoir des procédures variées sur les techniques de séparation de différents constituants, de réaliser la boule à neige et à pluie (attention à bien rester dans le cadre d’une démarche techno-scientifique dont on tire des concepts et non sur un simple jeu), d’engager les élèves dans des démarches d’investigation, etc.

Nous le voyons, la démarche rencontre assez bien la visée 1 du référentiel « Pratique des sciences » : proposer une explication/hypothèse ; expérimenter ; faire évoluer les explications/hypothèses ; garder des traces ; etc. Pourvu que la conduite des séances permette aux élèves de ne pas en rester au faire des tâches proposées pour construire véritablement des connaissances en sciences et technologies.


Extensions possibles et outils complémentaires

Il faudrait être vigilant à ne pas penser que concernant les eaux usées  – c’est bien le thème de cette séance, il faudra revenir là-dessus après ces expériences – le rejet dans l’environnement qui est fait n’est pas celui d’une eau potable, même si elle pourrait sembler claire ; et qu’elle ne sera pas récupérée pour la consommation humaine la plupart du temps.

Cette situation peut sembler étrange ; elle peut donc légitimer la visite une station d’épuration. Cette visite aurait pu se faire avant les expériences envisagées ci-dessus, comme moyen d’engager les élèves dans une démarche une fois revenus en classe. Néanmoins, dans le fil rouge que nous proposons ici, une visite après la séance en classe a toute sa pertinence. L’avantage de le faire après est de prendre connaissance d’autres techniques utilisées par les humains et de regarder celles-ci avec un premier bagage de connaissances techno-scientifiques.

La visite d’une station d’épuration est relatée dans la brochure Mélanges et démélanges (2012), p. 36-37.

Une visite virtuelle : https://visitesvirtuelles.suez.fr/LesBouillides/

Une autre extension est possible en rencontrant la visée 4 de ce chapitre de P3, « Orienter ses choix et agir en s’appuyant sur les sciences ». Nous proposons de rencontrer cette visée via la solution et le problème du dessalement de l’eau. En effet, la saumure rejetée bouleverse les écosystèmes concernés et l’énergie que nécessite le dessalement demande aussi un approvisionnement important, s’accompagnant potentiellement du rejet de gaz à effet de serre.

Deux articles de presse :

En complément : https://www.suezwaterhandbook.fr/etudes-de-cas/dessalement

Ici la technique de séparation (principalement le sel de l’eau) se fait là avant la consommation. Mais il peut aussi s’agir de récupérer le sel : c’est ce qui est visé dans le le travail du paludier et les marais salants (exemple page 9 du magazine n°1 de Sciences en Cadence).

La brochure Mélanges et démélanges (2012) présente une démarche riche construite en gradation pour les niveaux M1 à P6. Là, la réalisation de la boule à neige mobilise la viscosité des liquides. La (fausse) neige tombe plus ou moins vite selon la nature du liquide qui remplit la boule (eau, huile, glycérine). Cette activité centrée sur le concept de viscosité peut donc être une extension des séances portant sur le cycle de l’eau.
(Des rappels théoriques sont proposés p.40-47).

Pour un recul didactique, consultez la page « matière » de la plateforme DidacSciences.